Dalida au croisement des cultures

Mardi 23 Juin 2020-00:00:00
' Chaimaa Said

Depuis quelques semaines, un nouveau livre publié par la maison d’édition Orients et écrit par Jacqueline Jondot a vu enfin le jour. Il s’intitule « Helwa ya baladi, Dalida en Egypte ». Helwa Ya baladi (Beau, ô toi, mon pays) est le nom d’une chanson à succès en langue arabe interprétée par Dalida en 1979. Avec beaucoup de sincérité, elle y exprime son amour démesuré à son pays natal l’Egypte. Avec le titre, on sait de quoi on parle. On met l’accent sur l’égyptianité de la fameuse chanteuse qui est aussi italienne et française. C’est pour cela que le livre écrit en français est traduit en italien et en arabe ainsi qu’en anglais – la langue utilisée lors de l’occupation britannique de l’Egypte au temps des débuts de Dalida. Ce sont les langues qui ont formé largement son oreille en plus d’autres comme le grec, l’arménien…

L’éditeur insiste que ce n’est pas un livre qui parle de la grande Dalida et ses années de succès en France et ailleurs. Mais de Dalida l’égyptienne qui habite à Choubra d’une famille catholique pratiquante, que ses premiers pas dans le monde des concours de beauté ont contrariée. Ce qui était rarement abordé.

Jacqueline Jondot, l’auteur du livre, professeur de langue anglaise à l’Université de Toulouse, nous dit à propos du choix de ce sujet : « Je fréquente l'Egypte depuis plus de 40 ans; j'y ai passé beaucoup de temps dans des bibliothèques pour mes recherches universitaires - je suis spécialiste de littérature arabe d'expression anglaise. C'est mon intérêt et mon amour pour l'Egypte qui m'ont amenée à ce livre sur Dalida, artiste avec laquelle j'ai grandi. » Puis, elle ajoute : « Je suis de la génération BAMBINO. Mon village d'origine était peuplé de nombreux immigrés italiens, la plupart Calabrais comme les grands-parents de Dalida.. J'étais donc prédisposée à être sensible à cette Dalida, au croisement de toutes ces influences culturelles. Comme dans mes travaux universitaires, c'est cette zone d'interactions culturelles qui m'a amenée à écrire ce livre sur Dalida ». Elle dit ensuite que c’est ce qui lui a permis de découvrir des pans de l'histoire égyptienne qu’elle connaissait mal - comme la Seconde guerre mondiale et ses implications sur la communauté italienne - ou des quartiers du Caire qu’elle fréquentait peu. Bien que Choubra soit proche de son quartier de Faggalah, elle n'y allait presque jamais. Ce livre lui a permis de faire de belles rencontres avec quelques témoins de la vie égyptienne de Dalida et elle a pu sentir à quel point elle faisait partie du patrimoine égyptien auprès de ses amis et connaissances, au Caire ou en Haute-Egypte.

Reste à ajouter que le livre est plein de photos et de documents inédits sur les années de Dalida passées en Egypte, ce qui enrichit notre esprit sur cette période avant les années 50 ainsi que les années 70. Il nous est clair que l’auteur a fait beaucoup de travail de recherche et un grand effort pour obtenir ces documents. De même, parmi les témoins auprès desquels elle s’est renseignée : Orlando, le frère de Dalida, et les familles de Youssef Chahine et d’Angelo Boyadjan qui lui ont ouvert leurs archives.

Enfin, Jacqueline Jondot a réussi à graver dans notre mémoire le passé d’une Egypte belle et libre dont Dalida faisait partie.